Lettres de naturalisation d'Henri II aux Écossais en 1558

MARIAGE DU DAUPHIN AVEC MARIE STUART.

JUIN 1558.

LETTRES DE GRANDE NATURALISATION ACCORDÉES PAR HENRI II AUX ÉCOSSAIS À L'OCCASION DU MARIAGE DE MARIE STUART AVEC LE DAUPHIN.

(Bibl. impériale - Fonds Colbert, Coll. des 500, t. CCCCLXV, p. 328. - Copie du temps.)
(Voir aussi : Vérification par le Parlement de Paris)

HENRY par la grâce de Dieu roy de France, à tous présents et avenir salut. Comme depuis le mariage cy-devant pourparlé entre nostre très cher et très aimé fils le Roy-Dauphin et nostre très chère et très aimée fille la Royne-Dauphine, son espouse, faict, arresté et consommé, les députez des Estats du royaume d'Escosse ayent, pour et au nom desdicts Estats, faict à nostre fils le serment de fidélité, comme à leur vray et naturel seigneur qu'il est, au moyen de quoy s'estans les subjects des deux royaumes, qui ont, jusques icy et dèz longtemps, ordinairement communiqué ensemble et vescu en mutuelle amitié et intelligence, favorisez et secourus les uns les autres, par l'approche des maisons de France et d'Escosse, tellement unis ensemble que nous les estimons comme une mesme chose ;
Et désirans, à ceste cause, pour mieux establir, entretenir et fortifier ceste amitié entre nosdicts subjects et ceux dudict royaume d'Escosse, et donner ausdits habitans d'celuy royaume d'Escosse plus de moyen de visiter leur Roy et Royne, quand ils seront de deçà, résider auprez d'eux, les suivre et servir, comme à bons et fidèles subjects appartient, les gratifier et favoriser des grâces et privilèges dont jouissent nos propres subjectz,
Sçavoir faisons que Nous, ces choses considérées, et pour plusieurs autres grandes et raisonnables causes à ce nous mouvans, avons à tous les habitans dudit royaume d'Escosse subjectz de nostre filz Roy-Dauphin et nostre fille son espouse, permis, accordé et ottroyé, permettons, accordons et ottroyons par ces présentes qu'ils puissent et leur loise, toutesfois et quantes quand que bon leur semblera, habiter, venir, résider et demeurer en cestuy nostre royaume et en iceluy accepter, tenir et posséder tous et chascuns les bénéfices, dignitez et offices ecclésiastiques dont ils pourroyent estre justement et canoniquement pourveus à bons titres, non dérogeant aux saincts décrets, concordats, privilèges, franchises et libertez de l'Église gallicane ; d'iceulx prendre et appréhender la possession et jouissance, et en recevoir et percevoir les fruicts, profits et revenus, à quelque somme qu'ils soyent et se puissent monter, et d'advantage acquérir en nostre dict royaume, païs, terres et seigneuries de nostre obéissance tous et chacun les biens, tant meubles qu'immeubles, qu'ils verront bon estre, les tenir et posséder, ensemble ceux qui leur pourront eschoir, compéter et appartenir soit par succession, donation ou autrement, et en ordonner et disposer par testament, ordonnance de dernière volonté, donation faicte entre vifs et en quelque autre sorte que ce soit, et que leurs héritiers ou autres, ausquels ils en auroyent disposé, leur puissent succéder, prendre et appréhender la possession et jouissance de leurs biens, tout ainsi que feroyent et faire pourroyent s'ils estoyent originairement natifs de nostre dit royaume et pays, sans que nostre Procureur général ou autres nos officiers puissent doresenavant prétendre lesdits biens à nous acquérir par droict d'aubeine, ni lesdits subjectz dudict royaume d'Escosse soyent en la jouissance de leurs biens aucunement troublez.
Et à tout ce que dessus nous les avons habilitez et dispensez, habilitons et dispensons par ces présentes, soit qu'ils soyent habituez en nostre dit royaume, pays, terres, et seigneuries de noz obéissances ou audit royaume d'Escosse, sans qu'ilz soyent tenus pour raison de ce nous payer ou à nos successeurs aucunes finances ou indemnité ; de laquelle, à quelque somme, valleur ou estimation qu'elle soit et se puisse monter, nous les avons, en considération de ce que dessus, quittez et déchargez, quittons et déchargeons, et d'icelle, en faveur de nostre fils et de nostre fille, faict et faisons don par ces présentes signées de nostre main, à la charge que, si, pour raison desdits bénéfices, se mouvoit procès, ils ne feroyent tirer ni convenir aucun de nos dits subjects sinon par devers ceux de nos juges ausquels la cognoissance en appartiendra.
Si donnons en mandement par ces mesmes présentes à noz amez et féaux les gens de nostre court de Parlement, Grand Conseil et de nos Comptes à Paris, et à tous nos baillifs et séneschaux, prévost et autres nos justiciers et officiers, ou leurs lieutenans, présens et à venir, et chacun d'eux comme à luy appartiendra, que de noz présentes grâce, congé, licence et permission, et de tout le contenu en cesdites présentes ils facent, souffrent et laissent lesdits subjects et habitans dudit royaume d'Escosse jouir et user pleinement et paisiblement, cessant faisant cesser tous troubles et empeschements au contraire, car tel est nostre plaisir, nonobstant que la valeur de ladite finance ne soit cy spécifiée ne déclarée, que tels dons n'avons accoustumé faire que pour la moitié ou le tiers, selon les ordonnances par nous et nos prédécesseurs faictes sur l'ordre et distribution de nos finances, et mesme celle du mois de décembre dernier par laquelle il est dict que tous dons, bienfaicts et récompenses seront payez par le thrésorier de nostre espargne ; à quoy nous avons de nostre pleine puissance et autorité royalle desrogé et desrogeons, et audit dérogatoire des dérogatoires y contenus, par cesdites présentes, et à quelque autre ordonnance, restrictions, mandemens et deffenses à ce contraires.
Et pour ce que de ces présentes l'on pourra avoir à faire en plusieurs et divers lieux, nous voulons qu'au vidimus d'icelles faict soubs scel royal, ou deuement collationnées par l'un de nos amez et féaux notaires et secrétaires, foy soit adjoustée comme à ce présent original, auquel, afin que ce soit chose ferme et stable à toujours, nous avons faict mettre et apposer nostre scel, sauf en autre chose nostre droict et l'autruy en toutes.
Donné à Villiers-Cotterest, au mois de juin 1558, et de nostre règne le douzième. - Ainsi signé :
HENRY. - DE L'AUBESPINE.


Voir aussi : Vérification par le Parlement de Paris

Source :
Alexandre TEULET - Archiviste aux Archives de l'Empire,
RELATIONS POLITIQUES DE LA FRANCE ET DE L'ESPAGNE AVEC L'ÉCOSSE AU XVIe SIÈCLE - Papiers d'État, pièces et documents inédits ou peu connus tirés des bibliothèques et des archives de France,
Nouvelle édition, Tome premier - Correspondances françaises 1515-1560 (François Ier, Henri II - Jacques V, Marie Stuart),
Veuve Jules Renouard éditeur - Libraire de la Société de l'histoire de France - 6 rue de Tournon - Paris,
Imprimerie G. Gounouilhou - 11 rue Guiraude - Bordeaux,
1862.
Transcription : © MB, Nancy, 22 décembre 1999.

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